Je suis au travail, mais
j'ai envie de lire. Je sais que mon livre se trouve tout près, dans mon sac
posé à mes pieds. Je n'aurais qu'à ouvrir le sac, glisser ma main
à l'intérieur et toucher le livre; je repère toujours mes livres
rapidement, sans regarder. Mes mains aiment la sensation de la couverture et du
papier et ce sont elles qui découvrent l'oeuvre avant moi. Je sais que je ne
prendrai pas le livre, que je continuerai à faire le travail qui se doit, mais
je ne cesserai d'y penser et d'attendre le moment où je pourrai m'y replonger. Je ne
prendrai pas mon livre, mais je me demande pourquoi. Je me demande ce qui
m'empêche ou me pousse à faire ou ne pas faire certaines choses. Souvent, je
m'imagine aller au-delà de la limite que je me suis imposée (Laquelle? Depuis
quand? Pourquoi?) pour braver mon conformisme et briser mes conventions.
Je souhaiterais parfois être imprévisible, injuste, égoïste, horrible, sans
coeur. Je voudrais me laisser dominer par ces bas sentiments obscurs,
ignobles, simplement pour connaître l'autre versant, cet ubac que chacun de
nous porte. Si je touche à cet autre penchant, j'aurais ainsi l'impression
de connaître l'étendue de ma structure, de mon être dans son intégralité.
Serais-je ensuite capable de me regarder dans les yeux? J'ai bien peur que
oui...Ce sont des sentiments, des caractéristiques qui existent et nous
composent. Peut-être que dans certaines situations ces traits sont
légitimes, voire indispensables. J'ai toujours eu l'impression qu'on
devait choisir entre ces deux pôles, se livrant ainsi une rivalité à soi-même,
à ce qui repose en nous. Pourquoi pas un peu de tout ça à la
fois? La pleine authenticité n'est-elle pas d'accepter toutes ses propres
composantes et les héberger du mieux possible? La négation ou le
refoulement ne mènent-ils pas tout droit au désordre, à la
déroute?
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